Prendre la plume en ce 14 avril, au 28ème jour, pour lancer ce blog qui était en projet – et le ressentir chaque jour passant comme une nécessité accrue. Ce blog a pour objet une information professionnelle, destinée aux commerçants avant tout certes, mais aussi aux artisans et indépendants – toutes ces “petites” structures portées par des entrepreneurs souvent seuls, parfois avec quelques salariés. Néanmoins, je ne peux le lancer sans vous faire part dans ce premier article de mon état d’esprit et de mon cheminement.
La première semaine du confinement, après le 16 mars, fut celle d’un temps suspendu. L’arrêt immédiat de l’activité et des contacts m’ont conduite à une forme de sidération. Une sidération qui n’était pas un arrêt des fonctions vitales tout de même, mais cette sensation de flotter, planer, pour descendre doucement se poser dans un rythme nouveau, celui de la nature avant tout (de l’avantage d’un jardin au printemps, qui évolue de jour en jour). Un rythme biologique aussi, comme se réveiller naturellement. Cette première semaine fut celle de la “digestion” de cette nouvelle situation, également celle de la recherche d’informations, s’informer pour comprendre.
Après ce temps de recentrage de 10 jours, sans nul doute nécessaire pour pouvoir être utile dans la suite, vint le temps de prendre soin des autres. Appeler les prospects, les clients, pour s’enquérir de leur situation, de leur moral, échanger avec eux sur la manière dont ils vivaient et voyaient les choses : des commerçants fermés du jour au lendemain, des artisans dans le BTP ne sachant sur quel pied danser avec leurs chantiers et leurs salariés, des porteurs de projet encore plein d’élan.

De ces échanges, et de tout ce que j’ai pu observer dans les groupes spécifiques (Facebook par exemple) dans lesquels je suis présente, je distingue deux profils :
– Celles et ceux qui sont paralysés par cette crise, par les peurs qu’elle génère, ou bien en colère et en lutte ; dans les deux cas, une action positive est très compliquée à mettre en route. Je ne peux que les écouter.
– Celles et ceux qui sont dans une forme d’acceptation et essayent en conséquence de voir comment mettre à profit, dans cette situation totalement inédite, cette donnée si rare pour un commerçant ou un entrepreneur : le TEMPS.
Sont venus vers moi alors des personnes qui avaient envie d’avancer sur des questions de fond quant à leur activité, pour la développer. Projeter ce que pourra être leur commerce sur les mois à venir même dans ce contexte d’incertitude ; réfléchir à la communication à mettre d’ores et déjà en place pour garder le lien avec les clients, parce que ces commerces sont des lieux de vie ; imaginer des actions pour témoigner sa motivation et garder l’engagement des clients ; continuer de construire son projet d’activité pour passer de salarié à indépendant… Des motivations et des actions différentes, mais toutes avec un axe fort : L’HUMAIN.
Pour bon nombre de commerces, non alimentaires en particulier (je pense aux boutiques de mode que je connais bien), les deux mouvements de fonds que sont la croissance du e-commerce et l’éco-consommation (et la pratique de la seconde main) ont bouleversé le paysage. Je constate que les commerçants qui, avant la crise du Covid-19, considéraient que ces facteurs étaient responsables de la dégradation de leur situation – situation qu’ils subissaient – sont les mêmes qui sont aujourd’hui paralysés.
Ceux qui étaient dans une dynamique de remise en cause, d’adaptation, d’agilité, sont ceux qui actuellement construisent pendant qu’ils ont du temps pour le faire.
Ma conviction intime est que les commerces physiques auront toujours leur carte à jouer, même après cette crise : cette carte est celle du commerce de proximité. S’ils savent faire de leur commerce un lieu de vie, un lieu d’échange, un lieu d’implication, les clients viendront, pour acheter non pas seulement un vêtement, un objet, un livre, ou quoique ce soit d’autre…
Ils viendront acheter le moment qui va avec, l’accompagnement, le soin qui a été mis à choisir cet article-là plutôt qu’un autre… L’énergie que le commerçant aura investie dans toute la mise à disposition du produit et le conseil qu’il aura donné, pour que ce soit le bon produit pour la bonne personne.
Consommer moins, mais consommer mieux. Connaître l’histoire du produit, d’où il vient, comment il a été fabriqué, puis distribué, choisi, présenté… Avec un système respectueux de chaque intermédiaire, des marges raisonnées et raisonnables pour tous.
Voici ce que le Covid-19 et le confinement m’invitent à penser, à promouvoir, à mettre en place avec celles et ceux qui partagent les mêmes convictions.